j'avais déjà fait un petit truc là dessus sur Mad et un autre sur l'anarchiste courronné, voilà je le réédite ici.
Sympathy for the Devil, de Kent Anderson, un poulain et un ami de James Crumley, que je vénère et c'est vrai que sa simple introduction m'a poussé à ouvrir le livre.
Sympathy for the Devil est comme son nom l'indique à sa façon, un livre rock'n roll, un livre total, complet. Il commence sur les Stones (d'où est tiré le titre) et relate le parcours de Hanson au Vietnam. Anderson a lui-même été ce Hanson, trouffion dans les bérets verts qui choisi de servir dans les Forces Spéciales pour ne pas être un simple biffin, de la viande à canon.
Construit en trois parties, on le suivra avant son départ pour le pays, the World comme disaient les grunts de cette époque où il se retrouve totalement inadapté, puis lors de son entrainement et durant ses premiers pas dans la guerre, et enfin pour un second tour au Nam, où il décide de revenir, pour mourir, l'espère t-il.
Un humour féroce (et parfois très noir), une grande nostalgie, des moments de poésie extraordinaire (avec une tendresse immense pour les animaux) et en filigrane, qui ne vous quitte jamais, la mort, la guerre, l'horreur ici regarder avec une humanité rare. Impossible d'oublier cette fois où Hanson verra mourir un tigre sous l'effet de l'Agent Orange, où quand il regarda mourir un ennemi, yeux dans les yeux. Une écriture cinématographique, très imagé, et à la fois simple, un grand assurément.
N'empèche, malgrès tout cela, j'ai eut avec ce livre des moments d'hilarité extraordinaire, voir un de mes passages préférés dont je vous livre un extrait. Ici Hanson et ses potes en ont après le chien du sergent du mess du 3ème Mech, le régiment qui symbolise toute la suffisance de l'armée dans cette guerre et est naturellement l'ennemi naturel de ces têtes brûlées que sont Hanson, Quinn, Silver... Pour indication le chien mascotte de cet bande de green beret s'appel Hose, un affreux batard tout de traviole depuis qu'il s'est fait rouler dessus par un camion quant il était chiot. Un clebs qui ressemble aux gens que Anderson aime, les outcast.
... Et il s'envoya coup sur coup deux rasades, direct au goulot de la bouteille de scotch verte. "Mais ouais, dit-il. Mais ouais, mec. Adieu l'Noiraud, adios l'enfoiré. Il est cuit, mec. Fini. Un vrai hachis de clébard !"
Il se dirigea vers une grande armoire en tek et l'ouvrit. Elle était bourrée d'armes. Il y avait là une mitraillette Thomson, une "K" suédoise, une AK-47 pliable, .45 de l'armée, un Colt Python, des mines claymores et des fusées éclairantes. Il en sortit une grenade et la tint un moment dans sa main, puis la remit en place dans sa boîte. "Dawson aime bien être prêt, fit-il en entrechoquant fusils et boîtes de munitions. Il est pas loin d'être légèrement paranoïaque", poursuivit-il, en brandissant un sac de sept kilos d'explosif C-4.
" Un vrai hachis de clébard", marmonna Quinn, en se dressant et en traversant la pièce en direction de l'armoire. Il tendit le scotch à Silver, qui s'en enfila une autre longue rasade. "Ca, dit Silver. Ouais ! Ca !" Et il brandit un LAW.
"Un vrai tas d'boue, constata Quinn. Rappelle-toi Lang Vei.
- Peut-être pour tuer un tank, mais pas pour tuer un chien", fit Silver, en caressant du regard le tube métallique, long d'environ un mètre.
Le LAW, une arme antichar légère, tirait une unique roquette de 60 millimètres.Le tube, télescopique, pouvait s'étirer jusqu'à atteindre cent soixante-cinq centimètres, et on le balançait sitôt sa roquette incorporée tirée. Pendant l'assaut lancé par l'ANV sur le camps des forces spéciales de Lang Vei, ils s'étaient révélés quasiment inutilisables, infoutus qu'ils étaient, chaques fois qu'ils touchaient le blindage d'un char, de se décider à exploser.
"De la pâtée pour chien", dit Silver, en faisant coulisser le LAW pour lui donner sa longueur maximum, crevant dans le même temps son emballage de plastique transparent. Il franchit la porte, et les ténèbres l'engloutirent.
Quinn et Hanson se regardèrent : "il est bien trop bourré pour tirer au LAW" fit Quinn, et ils sortirent derrière lui.
Hanson avait des problèmes avec sa vision. Il avait de temps en temps l'impression de regarder dans un tunnel. Tout ce qui se trouvait à l'intérieur était net, tandis que tout le restant, en dehors du tunnel, était distordu. Il sortit une gélule de speed de la poche de sa chemise hawaïenne et l'avala.
" Ici, Noiraud. Vieeeens, mon chien." D'où ils étaient, ils entendaient Silver appeler le chien : "Oui, c'est un bon chienchien, ça, Viens, mon toutou, j'ai un chouette nonosse..."
Hanson trébucha et s'affala, se recevant sur les deux mains. Il entendait Silver se déplacer lentement en direction du cantonnement du 3ème Mech, en chantant : "Prom'nons Medor, prom'nons Médor..."
Quinn se prit les pinceaux dans le corps de Hanson et s'affala à son tour sur ce dernier. "Merde, dit-il. On va tous crever à Da Nang fin cuits.
- Vieeeens, toutou, ici, chienchien. J'ai une surprise pour toi...
- Rattrapons-le, dit Hanson. Aidons-nous à nous remettre sur pattes.
Pour indication Anderson est devenu flic après le Vietnam, il en parle à travers un autre roman, son second (toujours avec son alter égo Hanson) dans Chien de Nuit. Plus âpre, peut-être un peu moins drôle, mais tout ce qui fait la qualité de cet auteur est toujours là, intact. De la pure came littéraire.
Sujet: sympathy for the devil de Kent Anderson 
Jeu 29 Juil - 18:06
